A peu près tout ce qui restait abandonné sur le terrain pouvait être utilisé par les poilus coté Alliés.
Le bricolage en deuxième ou troisième ligne étant une façon utiles de passer le temps, il n’y a pas eu une famille française qui n’a pas eu son souvenir des tranchées contrairement au côté allemand, car il y avait pour ce dernier une interdiction de ramassage de tout métal, puisque tout était récupéré et retourné à l’arrière pour y être recyclé dans le cadre d’une économie de guerre rigoureusement organisée.
Le laiton de douille, les ceintures d’obus en cuivre, l’aluminium des épaves de dirigeables et d’avions, des têtes d’obus allemand Dopp, ont constitué la matière première la plus importante de l’artisanat des tranchées et tout particulièrement au niveau des briquets.
On trouve également les pièces de monnaies, considérées comme des portes bonheur ou souvenirs d’amitié entre soldats alliés, ce qui explique qu’on en voit beaucoup sans oublier les prises de guerre sur les prisonniers ou cadavres allemands. La plupart sont en cuivre ou en laiton, mais certains briquets portent des pièces en argent ou plus rarement en or.
Piece cuivre française, pièce argent anglaise, 2 pièces or françaises, 2 pièces argent US
Le bilan ne serait pas complet sans évoquer l’élément fondamental de liaison des différentes pièces constitutives du briquet : l’étain, récupéré sur les boutons d’uniformes, les boites de conserves, sur les objets domestiques trouvés dans les ruines des maisons ou villages détruits. Le plomb, contrairement à ce que l’on pourrait croire, n’a pas ou très peu été utilisé pour les soudures, bien que plus facile à obtenir car son point de fusion (327°) est plus haut que celui de l’étain (231°) et donc, moins facile à manipuler. La simple flamme d’une bougie ou d’un autre briquet permet en effet de fondre l’étain et donc de souder.
Les gravures, mentions, dates, lieux, pays, noms ou initiales sur les faces des briquets, peuvent avoir été faites au poinçon, à la pointe sèche, au couteau, quand c’était en 2ème ligne ou au repos.
Mais beaucoup ont été effectuées par des graveurs professionnels à l’arrière, lors des permissions, des convalescences, ou après la guerre, mais dans tous les cas, enregistrent l’histoire et les souvenirs personnels de leur propriétaires.
En témoigne le missel magnifique présenté ici, accompagné dans sa boîte à coulisse du « certificat » explicatif rédigé par son possesseur.
Les différents systèmes d’ouverture :
Dans ce domaine, la créativité et l’imagination ont fait des merveilles : à capot amovible ou articulé, à glissière, à tiroir, à bascule, avec ou sans sécurité et même à verrouillage secret...
Contrairement aux briquets autres que missels, ces derniers ont été rarement conçus « à double carburation », c’est-à-dire, comportant une mèche à amadou complétant celle à essence au cas où le carburant viendrait à manquer .
Ceci s’explique d’abord parce que la forme même du missel ne se prêtait pas à l’adjonction d’un tube portant la mèche à amadou, mais aussi par le fait que la capacité plus grande du réservoir permettait une autonomie plus importante. L’étanchéité était en outre de meilleure qualité sur un missel couvercle fermé par rapport à un briquet à capuchon extérieur, très souvent perdu, ce qui laissait la mèche dénudée (les collectionneurs savent bien que plus de la moitié, si ce n’est plus des briquets parvenus jusqu’à nous, sont dépourvus de capuchons)
Et voici pour terminer un briquet tout à fait atypique car ne comportant aucun système d’ouverture. Molette sortie de mèche et capuchons sont situés en extérieur sur la tranche.
A propos du contenu du briquet, faisons litière du «coton» terme usité courrament, mais techniquement inexact. En réalité, les poilus utilisaient de la laine à matelas cad de la tonte brute servant à constituer les matelas, le coton étant rare, cher et réservé à un usage médical.
Il convient aussi, pour en terminer sur la technique pure, d’évoquer les chapes, plus communément appelées molettes par extension de la partie supérieure mobile (roulette) à l’ensemble du dispositif, constitué d’un tube, de la roulette ou molette, d’un ressort pousse pierre sécurisé par une vis terminale. La fabrication sur le terrain de cette pièce essentielle était très difficile car nécessitant un matériel spécialisé, et la plupart ont été fournis aux soldats par l’arrière.
Cependant on en trouve, dont l’apparence et la technique prouvent manifestement qu’elles sont «handmade».
Les différentes ornementations, rajouts, gravures et autres embellissements
Briquets industriels REIMS.
Toujours la même décoration avec coins rapportés en filigrammes et nerfs du dos estampés. Ces briquets qui étaient vendus dans la région de Reims et Arras comportaient, la plupart du temps, un médaillon représentant la cathédrale.
Structures identiques, coins «dentelles» identiques, écussons industriels identiques. Fabricant industriel inconnu :
Briquets industriels à motifs ésotériques.
Issus de la même série que celle de Reims mais avec des motifs rapportés qui n’apparaissent pas avoir de significations précises autres que décoratives.
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Briquets estampés
Plus rares que les briquets gravés, ils sont d’abord travaillés à plat avant ceintrage et mise en forme, ce qui nécessitait une grande précision dans les côtes et un savoir faire particulier.
Briquet chargé de symobles : D’un côté la croix de Lorraine et le chardon de l’Alsace. De l’autre, les initiales du propriétaire dans une couronne de feuilles de chêne, symbole de victoire.
C’est une ode à la reconquète des provinces perdues en 1870. Les deux faces sont unies sur le dos par la marguerite, symbole de l’amour.
Briquets avec compléments soudés.
Briquets gravés.
Voir les chapitres suivants et le dossier spécial « L’art du graveur ».