Histoire

LES ORIGINES

Avant la guerre et plus particulièrement entre la défaite de 1870 et l’ouverture des hostilités en 1914 le sentiment patriotique très fort, un nationalisme revanchard, le souvenir des «provinces perdues» d’Alsace et de Lorraine, la détestation du prussien barbare, ont contribué à la production de grandes quantités d’objets supports de ces thèmes, dont les encriers.

Cet objet aujourd’hui disparu a accompagné l’évolution des civilisations sur plusieurs millénaires. Inséparable de l’écriture qui marqua les débuts de l’histoire vers 4000 ans avant JC, ce récipient au départ uniquement conçu pour recevoir et conserver l’encre fut rapidement un support technique à vocation décorative ou artistique. Chargé de symboles, il servit également à répandre des idées philosophiques, poétiques ou politiques. L’accès à la culture dans la seconde moitié du XIXème siècle lui ouvrit l’ensemble des foyers et fut donc propice à une diffusion de ces idées. Il a suivi les modes et très impacté par l’histoire évènementielle, fut le reflet de nombreux thèmes populaires. De la fin du siècle aux années 1930, dans une période riche en bouleversements sociaux et géopolitiques, il connut un développement considérable. Aucun foyer n’en était démuni et l’école de Jules Ferry a eu sur ce plan un effet notable de diffusion même au niveau des familles les plus modestes.

Je me suis intéressé à cet objet dans la mesure où il fait partie intégrante de l’artisanat de tranchée qui y vit l’apparition de ses plus belles pièces. De fil en aiguille, j’ai étendu ma recherche et ma collection aux périodes ayant précédé et suivi la guerre d’autant que les principaux thèmes explorés recoupent ceux des briquets de poilus.

LE REGULE 

L’important développement du régule (alliage d’étain, de plomb et d’antimoine) beaucoup moins onéreux que le bronze a permis dès la fin du siècle le tirage d’un nombre considérable de pièces accessibles au grand public donc des encriers. L’école de Jules Ferry a rendu leur présence nécessaire dans les familles dont les enfants devaient suivre la scolarité obligatoire.

Malheureusement la fragilité du régule, cassant et difficilement réparable, et sa maladie spécifique (la lèpre) ont entraîné leur quasi disparition au fil des années. Les rares survivants ont été jetés ou détruits après la seconde guerre mondiale quand se sont répandu le stylo à encre incorporée et le stylo bille. En trouver un en bon état sur un vide grenier, chez un antiquaire ou en salle des ventes relève désormais de l’exploit.

On peut globalement distinguer 3 cycles dans la créations des encriers :

Avant la guerre : les encriers patriotiques

Dans les tranchées : l’artisanat

Après la guerre : les encriers du souvenir

Cette distinction peut paraître artificielle dans la mesure où le passage d’un cycle à l’autre s’est effectué progressivement. C’est ainsi que les encriers patriotiques d’avant- guerre ont continué à être diffusés entre 1914 et 1918 et que l’artisanat de tranchée a perduré après l’armistice mais les thèmes, les styles, les symboles et les thématiques évoqués sont bien représentatifs de 3 époques différentes.